Depuis 2023, Architecture Workroom Brussels accompagne un living lab dans la vallée du Herk et du Mombeek, explorant des solutions innovantes pour mieux retenir l’eau dans le paysage. L’objectif : prévenir les sécheresses et limiter les risques d’inondation. Comment intervenir de manière globale, en agissant non seulement sur les cours d’eau et les milieux naturels, mais aussi sur les villages, les champs, les forêts et les prairies environnantes ? Les inondations dévastatrices de 2021 ont mis en lumière la vulnérabilité de la vallée, soulignant l’urgence d’accélérer la mise en œuvre de mesures « éponge ».

Surnommée le « toit » du Démer en raison de sa situation en amont, la vallée du Herk et du Mombeek constitue un sous-bassin du bassin du Démer. Au cours de l’été 2021, les fortes précipitations ont provoqué plusieurs inondations dans la région, une situation qui pourrait bien se reproduire sans mesures adaptées. Si des actions « éponge » sont indispensables dans les parties inférieures de la vallée, une intervention sur les flancs et les zones supérieures est tout aussi cruciale. Le ruissellement trop rapide de l’eau provoque l’érosion du sol et augmente le risque d’inondations. Parallèlement, la sécheresse frappe durement le sous-bassin. Les étangs s’assèchent dès le mois de février, tandis que les exploitations fruitières et agricoles situées sur les flancs en amont peinent à maintenir leurs rendements alimentaires. Pour survivre, elles sont donc contraintes de se tourner vers des alternatives plus rentables, notamment dans la culture des pommes – une situation qui conduit à l’arrachage et au labourage des vergers, entraînant des conséquences néfastes pour le sol.

Point de départ : Le projet Weerbaar Waterland

Pour faire face à ces nombreux défis, il est essentiel de restaurer le paysage naturel et le réseau hydrographique de la vallée du Herk et du Mombeek. Dans cette démarche, le living lab bénéficie du soutien d’une coalition régionale dynamique, pilotée par l’organisation Regionale Landschap Haspengouw en Voeren (Paysage Régional Hesbaye et Fourons, en français) et par l’organe de gestion du bassin du Démer. Depuis plusieurs années, cette coalition s’engage pour renforcer la résilience des paysages dans le cadre du programme Water+Land+Schap.

Au sein du living lab, nous réunissions l’expertise scientifique et pratique acquise autour de mesures prises à la source, ciblant les zones naturelles, agricoles, urbaines et mixtes. Ces contributions nous ont permis de définir des objectifs en matière de sécurité de l’eau, au travers d’un processus de co-création inédit. Pour les atteindre, nous nous inspirons de la méthode développée dans le projet Weerbaar Waterland. Celle-ci consiste à fixer des objectifs spécifiques pour chaque zone, basés sur les dégâts jugés inacceptables par les gestionnaires locaux, tout en les confrontant aux risques liés au changement climatique. La recherche par le projet et la modélisation des impacts constituent nos principaux outils pour relever ce défi. 

L'objectif : Ensemble vers un paysage éponge

Parvenir à un consensus au sein de la coalition sur les risques acceptables ou non exige un processus social novateur, reposant sur une compréhension mutuelle. Chaque secteur fait face à ses propres limites et défis. Le secteur de la nature, par exemple, ne peut absorber l’intégralité des pics de précipitations si l’eau est de mauvaise qualité. De leur côté, les agriculteurs et agricultrices manquent souvent des compétences, des équipements et du temps nécessaires pour entretenir les bandes enherbées, pourtant cruciales pour ralentir le ruissellement. Quant aux villages, ils ne peuvent espérer que les inondations se résorbent dans les espaces ouverts si les infrastructures publiques, comme les routes, favorisent l’accélération du ruissellement. Ces nombreux exemples montrent clairement que la résilience d’un territoire repose sur les actions coordonnées menées à chaque niveau. Cette interdépendance entre les différents acteurs est ainsi placée au cœur du Living Lab Herk & Mombeek. Notre rôle est de mettre en lumière ces interconnexions et de les traduire en objectifs concrets, alignés sur une vision commune intersectorielle.

Méthode : Scénarios-hypothèses

Pour rendre les objectifs de la coalition tangibles, nous comparons différents scénarios en évaluant leurs conséquences, notamment sur l’aménagement du territoire. Par exemple, que se passerait-il si nous accélérions les mesures qui ont d’ores et déjà fait leurs preuves sans modifier l’usage actuel des terres ? Dans ce cas, les objectifs ne pourraient être atteints qu’en partie. En intégrant des solutions de génie civil aux usages actuels des sols, comme la création de bassins de rétention pour gérer les précipitations ou de réservoirs pour irriguer les cultures vulnérables à la sécheresse, les objectifs deviendraient réalisables, mais au prix d’interventions supplémentaires. Enfin, repenser l’utilisation des sols en fonction des caractéristiques physiques du système hydrologique pourrait aussi répondre aux objectifs, mais exigerait un équilibre délicat entre la capacité du paysage à retenir l’eau et les besoins hydriques des cultures et des écotopes.

La trajectoire que prendra finalement le living lab se situera entre les scénarios les plus extrêmes. La mission de la coalition est de développer une stratégie régionale durable qui articule une vision stratégique (le « quoi ») avec la faisabilité des mesures (le « comment »). Dans un certain nombre de domaines ciblés, nous élaborons des plans d’action combinant à la fois les savoirs locaux et les résultats de la recherche par le projet, garantissant ainsi une approche sur mesure, adaptée aux réalités du terrain.

Vers un plan d’action soutenu 

Rendre le paysage résilient pour l'avenir est un processus progressif. Le plan d'action 2025-2030 (soumis pour approbation en avril 2025) rassemble les actions à court terme qui auront un impact à long terme. La coalition fait des choix : les efforts sont focalisés sur une approche collective et la priorité est donnée aux mesures qui sont bonnes pour les inondations et la sécheresse, mais aussi pour le contrôle de l'érosion et la qualité de l'eau. Ce plan 2025-2030 élargit le champ d'action. Outre les mesures de démonstration avec quelques individus pionniers, nous misons sur une approche intégrée et sur le territoire par le biais de 'laboratoires de terrain’. Un laboratoire de terrain est une zone délimitée (2 000 à 3 000 ha) dans laquelle une combinaison de mesures est mise en place dans différents secteurs et thèmes - depuis le cours d'eau jusqu'au plateau en passant par les flancs. De cette manière, l'effet cumulatif des différentes interventions peut également être observé. 

Le contexte : Quatre coalitions WATER+LAND+SCHAP

Living Lab Herk & Mombeek est l’une des quatre coalitions du programme Water+Land+Schap qui expérimentent l’impact des mesures prises à la source sur les sous-bassins, pour lequel le Gouvernement flamand a prévu un budget d’investissement initial de 1 million d’euros. Les trois autres zones sont la région de la Gette, le bassin supérieur de l’Yser et la zone située entre Courtrai et Roulers. L’expérience que nous avons acquise dans le cadre du Living Lab Herk & Mombeek sera donc partagée avec ces autres bassins ainsi qu’avec la politique flamande. En outre, le Living Lab Herk & Mombeek a également été sélectionné comme Water-Oriented Living Lab par Water Europe, ce qui offre également des opportunités d’apprentissage au niveau international.

Période: 2023-2025

Initiateur: Architecture Workroom Brussels, la Vlaamse Landmaatschappij, la Vlaamse Milieumaatschappij, le Regionaal Landschap Haspengouw & Voeren et la KULeuven.

Partenaires: PIBO Campus, PC Fruit, Limburgs Landschap, Natuurpunt, le service des cours d’eau de la Province du Limburg, l’Agentschap voor Natuur en Bos, Watering De Herk, VITO, Provincie Limburg PNC, Boerenbond, PXL Bio-research, Kortessem, Wellen, Alken, Heers et Tongeren.

Avec le soutien de: Water+Land+Schap, Blue Deal, Vlaanderen Verbeelding Werkt, De Vlaamse Veerkracht, l'Union européenne, NBS4Local