La désimperméabilisation des sols est plus que jamais d’actualité. Depuis plusieurs années, nous voyons fleurir de nombreuses initiatives : des écoles métamorphosent leurs cours de récréation en oasis de verdure, des voisin·es s’unissent pour retirer les dalles de leurs rues, et les autorités locales redonnent aux places de village et aux marchés urbains un visage plus vert. Pourtant, en Flandre, l’imperméabilisation des sols continue de progresser — l’équivalent de dix terrains de football disparaît sous le béton chaque jour depuis 2015. Face à ce constat, dix-huit villes et communes ambitieuses, soutenues par l’appel à projets « Groenblauwe dooradering in de bebouwde ruimte » (littéralement « maillage vert et bleu dans l’espace bâti »), ont décidé de faire de leurs ambitions « vert-bleu » une réalité quotidienne. Inverser la tendance à l’imperméabilisation, c’est déjà un progrès ; construire des communes plus vivables, plus saines et plus résilientes, c’est aller encore plus loin !





Plus de cinquante projet sont réalisés dans le cadre de cet appel à projets. Elles portent notamment sur l’ouverture de cours d’eau cachés, la création de forêts de jeux humides, la restauration de connexions paysagères, l’aménagement de voiries en espaces verts et bleus ou encore la réalisation de projets de naturalisation. Au-delà de la réalisation des projets, de nombreuses questions émergent également autour des processus, des partenariats et de la pérennisation : comment mettre à profit les leçons tirées de l’aménagement d’une rue climatique à l’échelle de l’ensemble de la commune ? Comment préserver, à long terme et sur les plans juridique et urbanistique, les parcelles stratégiques pour le système d’eau ? Comment nouer les partenariats adéquats pour garantir la réussite des projets, tant au niveau du contenu que sur le plan des procédures et du financement ?
Lors de plusieurs journées d’accompagnement et d’ateliers de réflexion entre fin 2022 et 2025, les dix-huit communes se sont réunies avec des conseiller·ères en conception et des spécialistes pour soulever ces questions communes et partager leurs connaissances. Ces échanges ont débouché sur cinq axes de travail, qui visent à inspirer et soutenir les 267 autres villes et communes Flamandes de se lancer à leur tour.
· Adopter des réflexes pour un système vert-bleu
Les mesures vertes et bleues – telles que la désimperméabilisation, la rétention ou l’infiltration de l’eau, ou encore la plantation d’espèces résistantes à la sécheresse – n’ont pas le même impact selon leur localisation. L’interaction entre le relief, le sol, l’eau et l’usage des terres est un facteur déterminant. Des projets « vert-bleu » solides reposent sur une lecture fine du système écologique du paysage. C’est pourquoi nous avons élaboré une méthodologie concise, accompagnée de couches cartographiques, pour guider l’analyse d’un système vert-bleu et mettre en lumière les questions clés à se poser. Les exemples de Kontich, Menen, Alken, Arendonk et Herne illustrent comment cette lecture systémique peut orienter, dans la pratique, aussi bien la définition que la mise en œuvre des projets.
· Projets verts et bleus
Les cinquante projets soutenus révèlent une grande diversité, tant par leur échelle et leur localisation que par leur degré d’intégration dans le système d’approvisionnement en eau et la variété des partenariats mobilisés. Nous mettons l’accent sur cinq projets emblématiques, représentatifs d’autres situations en Flandre : le cimetière vert-bleu (Menen), l’îlot mauve de naturalisation (Avelgem), la place aquatique sur les flancs (Geraardsbergen), l’axe d’infrastructure vert-bleu (Izegem) et l’oasis de résurgence (Linkebeek). Pour chacun de ces projets, nous documentons les choix en matière de conception, les principes d’aménagement, les matériaux utilisés ainsi que les plantations choisies, dans le but d’inspirer les futures générations de projets.
· Portrait des chef·fes de projet vert-bleu
Réaliser un maillage vert et bleu est avant tout une travail humain. Portés par une dynamique stimulante, les projets verts et bleus évoluent dans des systèmes qui, aujourd’hui encore, ne sont pas entièrement adaptés à ces nouvelles pratiques. Toute initiative de changement, aussi positive soit-elle, rencontre également son lot de résistances. Les gestionnaires de projets doivent naviguer entre de nouveaux défis tout en répondant à des attentes élevées, tant en interne qu’en externe. Dans le cadre de cette axe de travail, nous donnons la parole aux chef·fes de projet à travers cinq entretiens approfondis. Ces gestionnaires évoquent le processus permanent d’évaluation, de négociation et de recherche du bon momentum pour impulser une percée : grâce à une politique locale ambitieuse en matière de stationnement (Temse), par l’acquisition stratégique de terrains (Kortemark), par des coopérations fortes au-delà des frontières communales (Landen), par l’établissement d’un inventaire des rues (Vorselaar) ou encore grâce à un travail interservices solide, de la vision jusqu’à la mise en œuvre (Courtrai).
· Renforcer la position de négociation pour les projets verts et bleus
Promouvoir ou imposer un aménagement vert-bleu de qualité reste juridiquement complexe. Les conflits autour de l’usage du terrain sont fréquents, la sécurité juridique est limitée, et les leviers financiers ne sont pas toujours faciles à mobiliser. Dans ce contexte, une gouvernance forte et un véritable pouvoir de négociation du côté des autorités locales sont essentiels. S’appuyant sur les expériences de Menen, Harelbeke, Genk et Anvers, Filip Canfyn (Rebel) et Laurens De Brucker (Xirius) proposent des outils pratiques pour renforcer la position de départ dans les processus de négociation : mieux comprendre et développer ses avoirs fonciers, fixer des conditions juridiques solides et établir des cadres politiques clairs.
· Innovation politique
Le Département flamand de l’Environnement a dressé un inventaire des outils de planification actuellement utilisés par les communes. Celui-ci met en lumière, d’une part, les instruments les plus fréquemment mobilisés et, d’autre part, les lacunes du cadre existant.
Les dix-huit communes bénéficient du soutien du Département de l’Environnement, financé par le programme « Blue Deal ». Chaque commune a été accompagnée individuellement par des conseiller·ères en conception – Fallow, 51N4E et Plant & Houtgoed, Maarch & GroenLab, et PTArchitects – et a pu faire appel à un groupe de spécialistes pour des questions spécifiques : hydrologie (Sweco), biodiversité (Corridor), circularité (Sweco), participation citoyenne (The Middle Men), finance (Rebel) et droit (Xirius). Par ailleurs, Breekijzer a développé un « scanner de désimperméabilisation ». S’appuyant sur l’expérience acquise lors des premières générations du « Parcours à l’élimination des surfaces imperméables » (Proeftuinen Ontharding), Architecture Workroom Brussels a accompagné le Département de l’Environnement dans la création d’un environnement d’apprentissage partagé. Nous avons également compilé les enseignements tirés de ce parcours triennal et présidé la chambre de qualité, aux côtés des membres externes An Rekkers, Sylvie Van Damme, Jorryt Braaksma et Oswald Devisch.